Les images ont-elles besoin de lieux ?

Collaboration avec le Nova
RENCONTRE & CRÉATION COLLECTIVE D’AFFICHES
Samedi 3 février 2024 de 12 h à 16 h
6 rue des Mariniers à Molenbeek
avec des crêpes
avec l’ouverture de la Médiathèque NGHE et son petit bar
** Venez avec une image**
Nous vous proposons de nous rejoindre le temps d’un après-midi pour imaginer et imprimer ensemble les créations qui seront exposées au Nova.
Le bail du Cinéma Nova arrive à son terme. Est-ce qu’on arrive à l’acheter ensemble pour qu’il continue d’exister ? > Supernova ! Les Habitant·es des images ont été invités à participer à l’exposition d’affiches et multiples Fin de bail ? Même pas peur ! #3.
Les Habitant·es des images sont en train de réaménager leur propre atelier de création collective pour mieux l’ouvrir au quartier. Un cinéma, c’est un lieu réel et collectif pour les images, les fantasmes, les frissons… Pourquoi c’est important ? Aujourd’hui les images et les textes se partagent si facilement sur internet. Alors d’où vient ce besoin féroce d’enraciner nos fictions dans un lieu, un territoire ?
Philippe du Nova nous l’a dit : pendant le confinement, le Nova n’avait vraiment pas envie de digitaliser son festival de film car ça n’avait aucun sens, mais non ! Et qu’est-ce qui se passerait alors, si nos « chambres à soi » devenaient dans le futur le seul espace physique de nos expériences : émotions, travail, loisirs… ? Et que se passerait-il pour celles et ceux qui n’ont pas d’espace à eux ? Derrière les images, le réel brûle. Les enjeux de propriété, de territoire et de droit à circuler sont au cœur de la nécessité de créer des villes qui puissent accueillir nos vies, nos rêves et nos soifs.
>>> Le vernissage le jeudi 8 février à 18 h
au Nova, rue d’Arenberg 3, 1000 Bruxelles
avec Jean Guichon éditeur, le 75 et la Voix des Sans-Papiers
Affiches réalisées :



Texte de l’affiche issues des discussions :
Moi je suis là pour y croire ! // La vidéo a un impact. Elle rentre en moi sans toquer, dans mes émotions. J’ai ressenti de la colère et de la tristesse tellement fort pour des scènes qui ne me concernaient pas, pour des choses que je ne voulais pas voir. Il y a beaucoup d’argent et de pouvoir misés sur les images. C’est trop puissant. // Quand j’étais enceinte j’ai regardé un film d’épouvante. Je n’avais pas peur, j’aime ça. Mais mon bébé à l’intérieur se débattait. Pourtant il ne voyait rien. Je suis sortie de la salle. Par où passent les images ? Est-ce qu’elles passent par le sang aussi ? // Est-ce qu’on peut s’habituer à ça ? La violence, les émotions fortes toutes la journée sur les réseaux. On se désensibilise, oui sinon ce n’est pas tenable. On mute. // Avant l’arrivée d’Obama au pouvoir il y a eu plein de films avec des présidents noirs pour les USA. Ça a dû jouer un rôle dans le vote, non ? L’évolution du monde se nourrit des images, elles transforment les habitudes. // Ma fille est métisse. Quand elle avait 3 ans elle rêvait toutes les nuits qu’elle était blanche. Je lui parlais, mais ça suffisait pas. Puis on a regardé des clips avec des femmes métisses ou noires. Princess Nokia. Nina Simone (Ain’t got no/ I got life), elle joue au piano entourée de blancs qui l’écoutent. Ma fille voulait toujours revoir cette vidéo. Elle s’en rappelle encore aujourd’hui. En tout cas maintenant elle rêve qu’elle est métisse. // Un jour, nous étions au musée avec mon fils. Il y avait un film 3D sur les dinosaures. C’était tellement violent qu’il gémissait et pleurait en silence. Je lui ai mis mes mains sur les oreilles, mais je ne suis pas sortie. Je me suis dit, peut-être qu’il faut qu’il apprenne, il faut qu’il s’habitue ? Être sensible comme ça ça va pas Mais pourquoi s’habituer en fait ? On doit apprendre à dépasser ses peurs dans la vraie vie, mais en image, est-ce que c’est nécessaire ? // Mon ami, il est accro à des chaînes de discussion Telegram. Cadavres, accidents de voiture. En discutant avec lui il se dit qu’il est accro oui en fait. Ces images, ça répond aussi à quelque chose. Il a jamais vu de mort. Se confronter à la mort. C’est un besoin à un moment dans sa vie, non ? Moi j’ai eu ce besoin. À l’époque j’ai pas pensé aux vidéos. Si tu cherches à te confronter à des trucs durs et que tu vas chercher tes réponses dans les images, à un moment tu vas sentir que t’as pas vraiment accompli le truc ? À un moment tout ce qui te reste comme émotions, c’est la honte. // Toi tu penses qu’il y a des choses qui doivent rester cachées. Invisibles. Dans nos relations au sensible, au monde. Tu trouves qu’on prend beaucoup trop de photos. Dans l’écriture, il y a une part qui est cachée. Ça ouvre à une interprétation vaste. Ça te pousse à ne pas être soumis à la vision. Avec les images aussi, on peut ne pas tout dévoiler : suggérer, garder des mystères. Ne pas être soumis à la vision, oui j’aimerai bien avoir ce pouvoir. Ne pas chercher à tout connaitre, comme si tout voir c’était suffisant. // Mon ex, 25 ans, m’a dit : « Les images m’enlèvent mon énergie. Je ne veux pas être pris en photo, je ne veux pas regarder de film. Ce que j’ai le désir de voir, c’est ce que je veux vivre. Je veux le voir en vrai. Je ne veux pas perdre ce courage d’affronter mes fantasmes. » Il est mort jeune, d’une vie très intense. Parfois je me demande si le manque d’image l’a tué ? // Tu dis que voir l’image ça enflamme ta rage et après t’es plus calme. Parfois ça te fait taire pour rien. Parfois c’est nécessaire. Quand le tourbillon est trop fort, parler ne suffit pas. Des images rentrent en toi, direct dans tes émotions et c’est de ça dont tu avais besoin. Et tu peux aussi t’en servir toi-même ! // Maintenant, c’est moi qui vais vers les images. Je vais vers les images que je veux rencontrer, passer du temps avec. J’évite celles qui s’incrustent sans prévenir, celles qui m’emmènent dans des endroits où je ne veux pas aller. C’est moi qui tiens la barre. Enfin, j’essaie. // Oui, je suis là pour y croire !